Extrait de “Le destin de Maya”
Telle que vous me verrez dans le Journal “L'Union” de Reims |
Raoul qui ne pouvait pas passer un jour sans voir le bébé,
rendait visite à sa fille tous les jours, en sortant de son travail, avant même
de rentrer chez lui.
Cette préoccupation intriguait un peu Maya, non pas que son
père vienne la voir tous les jours, mais la façon dont il regardait le bébé et
elle-même : il semblait pensif à ces moments-là, comme si quelque chose le
tourmentait.
Elle aurait bien aimé lui demander le pourquoi de cet état,
mais elle ne voulait, en aucune façon, raviver en lui de vieux souvenirs qui
semblaient pourtant le hanter.
Il passait de longs moments tenant Préty dans ses bras, la
regardant et l’embrassant fréquemment avec une indicible tendresse :
alors, il semblait vraiment heureux.
Un soir où il s’attarda davantage, Maya l’invita à manger
avec elle et, bien entendu Raoul accepta aussitôt : c’était une bonne
occasion pour lui de rester encore un bon moment auprès de sa fille et de sa
petite-fille. Mais, ce soir-là ni Maya ni Raoul pensèrent à prévenir Poja.
Le repas terminé, Raoul prit congé des deux êtres qu’il
aimait le plus. Il semblait heureux de la soirée qu’il venait de passer avec
elles.
— Merci, chérie, à demain.
Pendant ce temps Poja attendait Raoul. Elle avait préparé le
repas, mit la table, car son mari n’arrivait jamais en retard, en quittant son
travail. Elle non plus n’avait pas eu l’idée de téléphoner chez Maya.
— Où es-tu allé, Raoul ? demanda-t-elle dès que
son mari entra. Je commençais à m’inquiéter.
— Mais, ma chérie, chez notre fille.
— Viens manger... c’est certainement déjà froid, dit
Poja résignée, sans demander d’autres explications.
— Mais, j’ai déjà mangé, Poja, chez notre fille.
— Je suppose que le téléphone était en panne, dit Poja
avec humour. Tu aurais pu au moins me téléphoner. Je suis surprise que Maya ne
l’ai pas fait elle-même.
— Excuse-moi, Poja, j’étais si enthousiasmé avec Préty que
j’ai tout oublié.
Poja remarqua que Raoul semblait pensif et même quelque peu
perturbé. Elle lui demanda :
— Qu’est-ce que tu as, Raoul ?
— Mais, je n’ai rien, Poja.
Poja se sentait blessée du fait que Raoul ne lui ait pas
téléphoné et lui dit :
— Chéri, tu savais bien que je t’attendais, dit-elle. Je
passe mes journées entre ces quatre murs en t’attendant, afin que tu me tiennes
compagnie et tu n’as même pas eu deux minutes pour me téléphoner ! Que se
passe-t-il ? Tu ne me sembles pas le même. Je t’aime, Raoul !
— Ne t’énerve pas, cela suffit pour aujourd'hui.
Mais Poja voyait bien qu’il y avait quelque chose… Elle
insistait lourdement, car elle voulait à tout prix savoir ce qui se passait,
car elle n'aimait pas le voir dans cet état.
Raoul, de son côté, ne voulait aucunement avouer à son
épouse ce qui le tourmentait alors et, pensant pouvoir couper court à toutes
ses interrogations, il alla dans le jardin. Mais il s’était trompé, car Poja le
suivit et remarqua qu’il s’essuyait les yeux. Elle s’approcha de lui et, quand
elle allait lui parler, Raoul lui dit d’une façon presque violente :
— Fiche-moi la paix, Poja !
(…)
Afin que la conversation avec Poja prenne fin, il revint
dans la maison, prit sa veste et sortit, sans rien dire d’autre. Poja était de
plus en plus étonnée, mais elle pensait qu’il reviendrait bien vite. Mais les
heures passèrent et Raoul ne rentrait toujours pas. La tristesse qu’il
ressentait et la curiosité de savoir ce que sa fille avait ramené du Portugal,
le conduisirent vers la maisonnette au fond du jardin de ses parents.
— C’est le moment de visiter la maison, dit Raoul à
lui-même. Je pourrai peut-être découvrir ce qu’elles ont caché ce
jour-là !
Laurette Rocha
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